Télévision
De la plaine du Forez à M6, la folle ascension de Laurent Jacquet
Longtemps artisan, Laurent Jacquet s’est lancé avec succès dans l’aventure YouTube, où ses vidéos instructives et pleines de bonne humeur cartonnent. Le Ligérien d’adoption gravit à présent une nouvelle marche en incarnant la nouvelle émission de M6 Mission travaux : ma maison est un chantier, diffusée mardi soir. Rencontre.
Il y a encore quatre ans, Laurent Jacquet “bichonnait” ses clients, pour reprendre l’expression de celui qui sillonnait alors le Forez en tant que plombier-chauffagiste. Mardi soir, il sera le visage de Mission travaux : ma maison est un chantier, la nouvelle émission de M6. Entretemps, sa chaîne YouTube LJVS - née au départ pour documenter la rénovation de la maison que lui et Carole, la femme qui partage sa vie, venaient d’acquérir - a connu une croissance exponentielle. Elle compte aujourd’hui près de 300 000 abonnés et deux de ses vidéos ont dépassé le million de vues ! D’autres initiatives, dont une deuxième chaîne YouTube et un podcast, ont fleuri, en faisant une référence dans le domaine de l’artisanat et du bricolage. Et ce n’est pas fini.
Cette notoriété numérique a logiquement engendré des propositions, dont celle de la télévision. Laurent Jacquet a donc dit oui à ce concept qui consiste à aider des particuliers en difficulté dans leurs travaux jusqu’à mettre en péril leur couple. « J’ai eu la chance, comme je le demandais, d’être très impliqué dans la construction de ce programme, raconte-t-il. Attaché à l’aspect humain, je souhaitais que les personnes chez qui on intervienne aient déjà entrepris quelque chose pour leur logement et comprendre pourquoi elles ont laissé tomber. L’idée, c’était de se concentrer sur quelques pièces stratégiques pour leur donner des clés, leur apporter une aide morale et technique, les rebooster pour qu’elles terminent par leurs propres moyens. On n’est pas le Père Noël, même si on leur fait un beau cadeau. »
Créer un électrochoc
Cette première l’a conduit en Normandie, au chevet d’Angélique et Christophe, puis auprès de Sabrina et Stéphane dans l’Ain. « C’était un heureux hasard de revenir tout près de là où j’ai grandi, de revoir ces paysages », note celui qui clame son bonheur d’habiter dans la Loire depuis une décennie. Dans les deux cas, Laurent est tombé sur des femmes démoralisées de vivre dans un chantier devenu permanent. Les Bichons – comme il appelle les membres de sa communauté en ligne –, le connaissent jovial et blagueur ? Ici, il n’hésite pas à sermonner leurs conjoints pour créer un électrochoc.
« Je suis quelqu’un de sympa, de marrant, mais j’ai toujours eu du caractère. J’aime quand on va au bout des choses et que tout est bien fait », signale-t-il. Avant de rappeler qu’il y a toujours une période de démotivation sur les chantiers, extrême dans ces deux cas-là. Il faut donc passer par une « phase de réveil » pour casser leur zone de confort et les ramener dans la réalité de leur maison : « Rénover, c’est fatiguant. On peut prendre une journée pour se détendre, mais elle ne doit pas se transformer en une semaine, un mois, un an. »
Un travail d’équipe
Après s’être imprégné du contexte, Laurent Jacquet retourne dans son atelier forézien pour bâtir un projet en bonne compagnie (carreleur, plaquiste, ébéniste-menuisier, peintre, électricien-plombier). L’équipe se rend ensuite sur place pour intervenir, tout en livrant des astuces, dans la lignée des tutoriels vidéos qui ont contribué à son succès : « Je ne voulais pas que ce soit uniquement du divertissement. J’avais cette volonté qu’on donne des conseils qui servent aux gens qu’on aide comme à ceux qui regardent. C’est certes une émission grand public, mais dans laquelle je répète mon attachement à la qualité professionnelle des produits et du matériel. » Cela vaut d’ailleurs pour la boîte à outils complète qu’il offre à chaque couple avant de repartir car « c’est le premier achat à faire, qu’on soit un expert ou un bricoleur du dimanche ».
À l’image de l’homme, le résultat à l’écran est chaleureux et positif. Dans Mission travaux, Laurent apparaît très à l’aise devant la caméra, facilité qui réside, selon lui, dans sa personnalité et son expérience sur YouTube, où il s’expose depuis des années. « Je suis resté fidèle au gars que je suis dans la vie, assure-t-il. En revanche, il a fallu que je tienne compte de la cible grand public de M6. C’est différent d’internet, où je suis suivi par une communauté avertie dont beaucoup de professionnels. Là, il fallait éviter le langage fleuri qui peut être le mien, ne pas citer de marques, savoir expliciter le jargon technique. »
« Une formidable aventure humaine »
Si tout n’est pas parfait à ses yeux, Laurent Jacquet se dit « assez content » du résultat final : « C’est comme un artisan qui regarde le chantier qu’il vient terminer. Dix personnes auront beau lui dire que c’est super, lui verra les choses qu’il pourrait améliorer. » La réflexion pour reconduire Mission travaux est en cours et dépendra en partie de l’accueil que recevra ce nouveau programme. Une attente que notre homme vit plutôt bien. « Cela fait cinq ans que je m’expose et soumets mon travail au regard du public, donc je suis assez détaché par rapport à cela, explique-t-il. Les réseaux sociaux m’y ont bien préparé, je sais que certains aimeront et d’autres non. »
Surtout, sa motivation première rejoint le leitmotiv qui le guide depuis longtemps : « La télévision a sauvé la cuisine, alors peut-être qu’on pourra aider l’artisanat, motiver les Français à découvrir ces fabuleux métiers. Si c’est le cas, on aura gagné. Bien sûr, je serais heureux que les téléspectateurs soit content et j’espère que l’émission va durer car l’expérience m’a beaucoup plu, mais je retiens avant tout la formidable aventure humaine qu’on a vécue. J’ai pris beaucoup de plaisir. »
Franck Talluto
Mission travaux : ma maison est un chantier, mardi 1er février, à 21h10 sur M6
Adoubé par Alexandre Astier
En salles, nombre de spectateurs de Kaamelott avaient probablement manqué la dédicace. Twitter s’est chargé de la mettre en lumière début janvier par un message auquel a répondu son réalisateur, Alexandre Astier
Le lien entre l’auteur de cette série passée du petit au grand écran et Laurent Jacquet ne saute pourtant pas aux yeux. « On se connaît depuis trois ou quatre ans, quand Alexandre m’a envoyé un message en me disant qu’il appréciait ma façon de m’exprimer, qu’il regardait mes vidéos et on a commencé à discuter, raconte le youtubeur forézien. Un jour, il a demandé à reprendre certaines de mes répliques et m’a prévenu que j’étais au générique de son film. » Une belle marque de reconnaissance pour Laurent Jacquet, qui aime beaucoup Alexandre Astier en tant qu’homme et en tant qu’artiste : « C’est un de mes mentors. Il a besoin de faire les choses par lui-même, on a la même façon de penser. Alexandre Astier est un touche-à-tout, capable de faire Kaamelott, une série culte et désormais un film, une BD, un spectacle sur l’astronomie (L’Exoconférence, NDLR)… C’est un génie, comme on en compte sur les doigts d’une main, avec lequel j’espère avoir la possibilité de boire un café. »